Gestion passive de fortune: ne payez plus pour rien!

© JULIETTE LÉVEILLÉ

Accessible, rentable et peu coûteuse, la gestion dite passive peine pourtant à décoller en Belgique. Basée sur l’évolution des indices boursiers, elle semble appelée à un futur développement, chez nous comme ailleurs.

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En s’adressant à un gérant de fortune, les investisseurs cherchent à obtenir un rendement plus attractif que celui offert par les produits d’épargne classique… et meilleur que s’il géraient eux-mêmes leur patrimoine. Symboliquement, l’objectif de nombre de gestionnaires est ainsi de battre le marché. Hélas, ils n’y arrivent quasiment jamais… ” Sur la durée, 95 % des gérants de fonds ne parviennent pas à faire mieux que les indices de référence “, affirme Jacques Berghmans, cofondateur de TreeTop AM. Cela s’explique notamment par les frais de gestion et autres coûts des fonds comme les frais de transactions, ce que confirment les études réalisées en la matière.

D’où l’intérêt de cette nouvelle formule en train d’émerger, que les spécialistes appellent ” gestion passive “. Concrètement, le fonds indiciel ou passif se contente de dupliquer un indice de référence, en investissant, par exemple, dans les vingt actions du Bel 20 ou les 600 du Stoxx Europe. Il n’y a donc pas d’équipe de gestion à rémunérer, ce qui permet de réduire substantiellement les frais : de 0,25 % à 0,50 % par an contre environ 1,5 % pour les fonds gérés activement, selon Jacques Berghmans.

” En tenant compte de l’écart de performance et des frais de gestion, un fonds indiciel affiche en moyenne un rendement supérieur de 1,5 % à 3 % par an. ” Sur une période de vingt ans, l’écart peut s’avérer conséquent : + 81 % pour un placement rapportant du 3 % par an et + 221 % avec un rendement annuel de 6 %. Même le célèbre investisseur Warren Buffett n’hésite pas recommander les fonds indiciels comme le meilleur moyen d’investir en Bourse.

Attention au pseudo indiciel

” L’absence de risque de gestion constitue un second atout de taille pour les fonds passifs “, selon Jacques Berghmans. Le recours à des indices élargis (comptant plusieurs centaines, voire milliers de valeurs) permet de largement diversifier son patrimoine à travers les pays, les secteurs et les profils de sociétés. Prêchant pour sa paroisse, Jacques Berghmans souligne que les fonds passifs sur les indices mondiaux sont l’essence même de la gestion passive.

Symboliquement, l’objectif de nombre de gestionnaires est de battre le marché

Le cofondateur de TreeTop avertit que de nombreuses offres de gestion passive affichent actuellement ” des frais de gestion bien supérieurs à la moyenne des fonds indiciels “. Jacques Berghmans y voit le signe de la politique des grands réseaux freinant des quatre fers le développement de la gestion passive. Cette dernière ” n’est pas dans l’intérêt des banques, les réseaux de distribution étant habitués à dégager de 1 % à 1,5 % de marge, ce qui est impossible si les frais de gestion ne sont plus que de 0,25 %. Par ailleurs, les spécialistes mondiaux de la gestion passive ne se montrent pas très intéressés par le marché européen, morcelé par d’innombrables barrières fiscales et réglementaires. Ils privilégient plutôt l’important marché américain et le marché asiatique en croissance. En Europe, la part de la gestion passive est ainsi bien inférieure aux 40 % aux États-Unis. ”

Selon un sondage de Profacts, seuls 8 % des Belges connaissent les produits les plus courants de gestion indicielle. Il est toutefois possible, et même de plus en plus probable avec MiFiD 2, que des clients en mandat de gestion investissent dans des fonds indiciels sans en avoir conscience, qu’il s’agisse pour le gérant d’augmenter temporairement le poids des actions, de miser sur l’or ou la Bourse japonaise par exemple.

Si vous souhaitez acheter directement un fond indiciel, baptisé ETF ou tracker et se traitant souvent en bourse, le cofondateur de TreeTop souligne qu’il en existe deux grandes catégories. ” D’un côté, les fonds répliquant fidèlement la composition de l’indice en investissant dans les actions concernées ; de l’autre, les fonds synthétiques ayant recours à des produits dérivés. Ces derniers impliquent un risque de contrepartie qui n’est pas négligeable, comme on a pu s’en rendre compte lors des déboires de Lehman Brothers. “

Le secteur financier menacé

La gestion passive ne compte pas que des partisans. Certains lui reprochent de menacer la stabilité des marchés et l’industrie financière. ” Il est vrai que les fonds indiciels permettent aux investisseurs de sortir plus rapidement des marchés au risque d’amplifier les chutes “, admet Jacques Berghmans (TreeTop AM). ” Il s’agit toutefois avant tout d’un comportement de base des investisseurs à corriger, vendre en cas de chute étant souvent une bien piètre décision. Il est clair, par contre, que l’industrie financière a beaucoup à perdre et on observe déjà des dégraissages dans les équipes d’analystes ou de gestionnaires. “

La gestion passive en Belgique

TreeTop fait partie des rares banques privées à miser sur la gestion passive comme produit d’appel au travers de deux fonds indicés sur le MSCI World, qui mesure l’évolution des Bourses mondiales (l’un étant prémuni des variations des taux de change). En cas de souscription directe, les frais d’entrée (0,1 %) et de gestion (0,3 %) sont directement perçus par le fonds. De nouveaux acteurs sont également en train de s’engouffrer dans la brèche de la gestion passive à l’image de la start-up Easyvest. Votre patrimoine y est réparti entre des produits de trésorerie, un fonds indiciel sur les actions mondiales et un autre sur les obligations souveraines de la zone euro suivant une méthodologie primée (traduite en code informatique). Comptez de 0,50 % (patrimoine à partir de 250 000 euros) à 1 % (dès 5 000 euros) de frais de gestion en sus des frais de courtage et frais inhérents aux fonds indiciels, qui sont de 0,3 % en moyenne. Le service KeyPrivate de Keytrade Bank est similaire à Easyvest mais avec un modèle de gestion affiné et un éventail plus large de fonds indiciels : les actions et obligations de différentes zones ainsi que l’or et les matières premières. L’objectif est, surtout, d’offrir un service de gestion pour des patrimoines plus restreints (à partir de 15 000 euros) pour un prix de 0,75 % + TVA, frais de courtage inclus mais hors frais inhérents aux fonds indiciels.

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