Carte blanche

“Les investisseurs n’ont pas intérêt à se laisser distraire par Le Pen ou Wilders”

Selon Marc Danneels, Chief Investment Officer chez Beobank, la probabilité est particulièrement faible que nous nous retrouvions avec un ‘Trump européen’ dans un avenir proche. “Cela n’a dès lors pas de sens de tourner le dos au marché européen des actions.”

D’un sondage il ressort que plus de 4 Belges sur 10 (41%) indiquent que l’incertitude politique en Europe influencera le fait d’investir ou de faire des placements ces prochains mois. 37% des Belges craignent par exemple qu’une victoire de Geert Wilders ait un grand impact négatif sur les marchés financiers. Marc Danneels, Chief Investment Officer chez Beobank, nuance et attire l’attention sur quelques opportunités de marché.

L’Europe n’est pas l’Amérique

En premier lieu, la comparaison entre l’élection de Trump aux États-Unis et l’impact de personnages comme Wilders et Le Pen ici en Europe mérite quelque peu de nuance. Le système multipartite en Europe fait que les chefs d’État et les partis gouvernementaux européens ont beaucoup moins de liberté d’action pour imposer leur agenda politique que le président aux États-Unis. En outre, les partis établis aux Pays-Bas et en France vont tout mettre en oeuvre pour éviter que respectivement le PVV et le Front National accèdent au pouvoir.

La probabilité que nous nous retrouvions avec un ‘Trump européen’ dans un avenir proche est donc particulièrement faible, ce que les analystes et experts boursiers admettent aussi. Ils craignent surtout la perspective d’une poursuite de la désintégration européenne sous l’influence de réflexes politiques populistes. Pour la première fois, un retour d’importantes compétences (économiques) vers les États membres ne semble plus exclu à l’avenir.

La remise en cause de plus en plus fréquente de la cohésion européenne se fait en outre déjà sentir maintenant sur les marchés financiers. Les primes de risque sur les obligations d’État de pays comme la France par exemple ont fortement augmenté ces derniers mois. Il est clair qu’à l’heure actuelle, les marchés financiers considèrent la politique comme un risque.

Le pessimisme est déplacé

Les investisseurs n’ont pas intérêt à se laisser distraire par Le Pen ou Wilders

L’investisseur européen ne doit toutefois pas désespérer. En premier lieu, il ne doit pas oublier que, indépendamment du calendrier politique, le contexte a rarement été aussi favorable aux investissements dans les actions européennes. L’économie dans l’Eurozone est favorable: au dernier trimestre, l’Eurozone a connu, pour le 15e trimestre successif, une poursuite de la diminution du taux de chômage. Et l’inflation arrive doucement à un niveau sain.

Au niveau microéconomique, les signaux sont à la croissance pour les investisseurs. Le dernier trimestre de 2016 a connu une croissance des bénéfices supérieure de presque 10% en moyenne par rapport à la même période de l’année précédente. Les analystes prévoient que la croissance des bénéfices se poursuivra également au cours de 2017.

Pour finir, le marché des actions européennes est actuellement faiblement évalué par rapport aux États-Unis ou aux pays émergents. Cela provient notamment de cette insécurité politique dans notre continent, mais aussi du fait qu’au cours des derniers mois, il y a par exemple eu un important transfert de capitaux d’investisseurs d’Europe vers les États-Unis. Les discours de Trump concernant les investissements en infrastructure et la dérégulation de certains secteurs ont créé une véritable reprise du marché boursier américain, ce qui a conduit à la sous-évaluation actuelle du marché européen par rapport au marché américain.

Stratégie d’investissement sélective

Cela n’aurait dès lors pas de sens de tourner maintenant le dos au marché européen des actions. On doit toutefois être sélectif dans les actions dans lesquelles on investit. Jusque mi 2016, c’étaient surtout les secteurs défensifs, les secteurs qui subissent peu d’impact de la conjoncture économique, comme les soins de santé et les télécoms, qui fonctionnaient bien. Dans le contexte actuel, on doit surtout se tourner vers les secteurs cycliques, qui bougent en fonction du rythme de l’accélération de l’économie mondiale et européenne.

Dans ces secteurs, on doit guetter les actions de valeur, des actions avec une valorisation de cours relativement faible. Ce sont ces actions qui peuvent le plus bénéficier de la croissance de bénéfices prévue, de la croissance régulière dans l’Eurozone et des pronostics de croissance positifs dans le monde entier, ainsi que de la poursuite de réflation prévue.

Les investisseurs européens n’ont donc pas intérêt à se laisser distraire par Trump, Wilders ou Le Pen. Les élections successives en Europe vont inévitablement conduire à des résurgences de volatilité dans les marchés financiers. La meilleure manière de gérer cela est le respect d’une approche d’investissement diversifiée, avec un set d’actifs minutieusement sélectionnés, différenciés de manière optimale par type et région. Dans ce contexte, une partie d’obligations gérées de façon flexible peut aussi avoir sa place.

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