Nyrstar condamné au miracle

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Le producteur et fondeur de zinc a dégagé un bénéfice surprise en 2017. Une hirondelle qui ne fait malheureusement pas le printemps de Nyrstar pour qui l’hiver apparaît interminable. Il ne pourra éviter le nouveau blizzard qui menace qu’en concrétisant les miracles promis pour 2018.

Pour de nombreux investisseurs, Nyrstar est davantage synonyme de douloureux souvenir que de nouvelle étoile étincelante (en anglo-norvégien). Le titre a été introduit en octobre 2007 au prix de 20 euros et un regroupement de titres (suivant un rapport de 10 pour un) plus tard, le cours oscille autour de 6-7 euros. La principale explication tient aux piètres résultats avec notamment 5 pertes annuelles consécutives entre 2012 et 2016. La série noire a été interrompue en 2017, bouclée sur un bénéfice surprise de 47 millions.

Un profit factice

Ce profit découle toutefois uniquement d’écritures comptables avec notamment la reprise de dépréciations sur des actifs miniers et l’impact des baisses de l’impôt des sociétés en Belgique et aux États-Unis. Au niveau opérationnel, les chiffres sont nettement plus mitigés. Son excédent brut d’exploitation (ebitda) a progressé d’à peine 5% à 205 millions, un redressement limité au cu de l’envolée tant attendue du prix du zinc et de la chute de 31% de son ebitda les deux années précédentes. Plus inquiétant encore, sa dette nette a continué de gonfler pour atteindre 1,1 milliard ou plus de 5 fois son ebitda, une cote d’alerte.

Des vents contraires face à Port Pirie

Le management a promis que ses principales activités dans les fonderies redeviendront positives en 2018 en matière de cash-flow libre. Pour y parvenir, le budget investissements est réduit de moitié dans le sillage de la finalisation de la rénovation de son important site de Port Pirie. Ce dernier doit également contribuer à hauteur de 40 millions à l’ebitda. Les analystes de DegroofPetercam peinent toutefois à croire que le groupe y parviendra. Il faudrait en effet un conjonction d’éléments favorables comme des prix toujours élevés du zinc, un dollar qui se remplume et des frais de traitements (ce que le fondeur obtient du groupe minier pour la transformation du minerai en métal) plus favorables. Ce dernier point apparaît d’ores et déjà compris. Selon Metal Bulletin, les groupes miniers ont proposé un tarif de base de 90 dollars la tonne, 48% de moins qu’en 2017 ; les fondeurs ont répliqué avec une offre à 200 dollars. Différentes sources ont ainsi confié à Reuters qu’un compromis devrait être trouvé autour de 140-150 dollars, en baisse de 16% et un manque à gagner de 37 millions pour les fonderies. La faiblesse du dollar risque d’encore coûter plus chère à Nyrstar, le groupe réalisant ses ventes en USD mais subissant une importante partie de ses coûts en euros et en dollars australiens. Au taux de change actuel de 1,23 (à comparer à une moyenne de 1,13 en 2017), Nyrstar évalue la perte de profits à 95 millions pour 2018.

S&P menace de couper les vivres

En ajoutant encore les investissements prévus dans les mines et les coûts de siège, il ne fait pas de doute que Nyrstar verra encore sa dette nette augmenter cette année. Ce fardeau pèse déjà plus de 5 fois son ebitda, un rapport intenable. En comparaison, Fagron était un peu plus de 5 lorsque sa crise financière a éclaté en 2015-2016, l’opérateur télécoms Altice a sombré à l’automne sous le poids de sa dette nette d’un peu plus de 4 fois son ebitda. Ce n’est donc pas une surprise si le cours des obligations de Nyrstar ont chuté ces derniers mois, une évolution renforcée par la hausse des taux et l’avertissement de Standard & Poor’s qui a abaissé sa perspective sur la note du groupe à négative. Avec un rating qui n’est déjà que de B-, Nyrstar risque ainsi de passer à CCC+, perçu comme l’antichambre du défaut de paiement. De B à CCC, le surrendement moyen demandé aux emprunteurs (par rapport aux taux de référence) passe ainsi de 3,5% à 8%. Impossible à payer pour Nyrstar qui va devoir compenser l’échéance d’un milliard de financements en 2018 (353 millions) et 2019 (658 millions).

Un miracle ou une augmentation de capital

Afin d’éloigner le spectre d’une dégradation de S&P, Nyrstar ne dispose pas de 36 solutions. Le groupe doit renforcer ses fonds propres et donc procéder à une augmentation de capital. Une opération qui signifierait un nouveau coup dur pour le titre qui avait déjà abandonné près de la moitié de sa valeur après l’annonce d’une levée de fonds à l’automne 2015. Pour éviter une telle désillusion, Nyrstar est condamné au miracle dès les premiers trimestres de 2018. Un détour par Lourdes ne serait donc pas superflu pour ceux voulant spéculer actuellement sur Nyrstar…

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