Les Exchange Traded Funds (ETF) ont le vent en poupe

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Les modifications réglementaires à venir devraient pousser davantage de particuliers vers les solutions indicielles.

Les ETF ( Exchange Traded Funds, ou fonds cotés en Bourse) sont appelés à prendre toujours plus d’importance, et constituent un des segments du marché des fonds de placement qui a enregistré une des plus fortes croissances durant les dernières années. Nous avons récemment eu l’occasion de rencontrer Mark Wiedman, global head of iShares (BlackRock), le plus grand acteur sur ce marché au niveau mondial.

” Cette croissance a été observée tant au niveau global qu’en Europe. Il faut noter que même des marchés supposés peu susceptibles de changer, comme l’Italie, ont été rapidement pénétrés par les ETF durant les dernières années. Nous nous attendons à une nouvelle progression tournant entre 13 et 15 % par an durant les prochaines années, avec une taille du marché qui devrait doubler pour atteindre 8.000 à 10.000 milliards de dollars d’ici 2023 au niveau global, et autour de 2.300 milliards d’euros au niveau européen “.

” En termes de parts de marché, dans l’industrie des fonds de placement sur l’ensemble de l’Europe, l’utilisation des ETF dans le segment de la gestion de fortune devrait progresser d’environ 11 % à 22 % en 2023. Y compris dans des pays où la part de marché des ETF est déjà en croissance comme la Suisse ou le Royaume-Uni “, constate encore Mark Wiedman.

Facteurs de soutien

Cette montée en puissance s’explique par quatre facteurs principaux. D’abord, les frais de ces produits sont nettement inférieurs aux fonds traditionnels, et ils ont tendance à diminuer avec la taille des actifs sous gestion. Deuxièmement, les banquiers privés font aujourd’hui face à de nouvelles contraintes réglementaires suite à la mise en place de la directive européenne Mifid2, et notamment l’obligation qui leur est faite d’être transparents quant aux frais qu’ils vont demander à leurs clients. ” Et la manière la plus rapide pour une banque privée de baisser ses frais sur les portefeuilles qu’elle gère est d’augmenter la proportion investie dans des ETF “, souligne encore Mark Wiedman.

Même des marchés supposés peu susceptibles de changer, comme l’Italie, ont été rapidement pénétrés par les ETF ces dernières années. ” Mark Wiedman, global head of iShares

Troisièmement, les ETF sont de plus en plus souvent utilisés par des fonds de pension ou par des investisseurs institutionnels pour prendre des positions à court terme sur certains segments du marché. ” Dans plusieurs d’entre eux, les ETF sont désormais moins coûteux que des contrats futurs. Les coûts de ces derniers ont fortement augmenté, car les banquiers doivent mobiliser davantage de fonds propres sur leur bilan “.

Enfin, les ETF sont également de plus en plus utilisés par des gestionnaires actifs, qui réalisent que ces produits sont des outils efficients pour construire les portefeuilles de leurs clients. Ces ETF peuvent contribuer à réduire le nombre de lignes directes au sein d’un portefeuille – dans certains cas, plusieurs centaines de positions peuvent être remplacées par un ETF – ce qui permet au gestionnaire de se concentrer sur la sélection d’actions qui apportent de la surperformance. ” Les fonds actifs qui ne génèrent pas assez de performance eu égard aux frais de gestion qu’ils demandent, ou qui sont trop calqués sur les indices, seront susceptibles d’être remplacés par des ETF “.

Rétrocessions

Dans l’ensemble, Charles Symons, head of iShares Belux, souligne que c’est l’impact de MiFID2 qui sera le principal moteur du changement sur le marché belge, davantage que sur les autres marchés. ” Lorsque les clients vont commencer à recevoir le décompte de leurs frais au début de l’année prochaine, les mentalités vont forcément commencer à évoluer et ils vont poser des questions à leurs banquiers privés, surtout si la performance des marchés n’a pas été bonne “.

Et de souligner qu’il y a cinq ans, la demande pour les ETF était pratiquement inexistante, car le modèle était alors de vendre les produits d’un gestionnaire tiers, qui rétrocédait une partie de la commission de gestion au banquier privé. ” Le modèle de distribution est aujourd’hui beaucoup plus ouvert, et de plus en plus de portefeuilles sont aujourd’hui construits en réservant une place plus importante aux ETF, sur lesquels ils ne perçoivent pas de rétrocessions, souligne encore Charles Symons. Les banquiers privés sont aujourd’hui en pleine réflexion quant à la manière dont ils vont positionner leur offre durant les prochains mois, et les ETF sont une manière efficiente d’optimiser leur budget de risque “. Dans le futur, il estime donc que les portefeuilles des banquiers privés combineront des ETF à bas coûts et des fonds de niche gérés activement et susceptibles de dégager une performance pour les portefeuilles.

De plus en plus de porte-feuilles sont aujourd’hui construits en réservant une place importante aux ETF, sur lesquels ils ne percoivent pas de rétrocessions.” – Charles Symons, head of iShares Belux

Clients “retail”

Ce n’est toutefois pas le client final qui choisira par lui-même de prendre des ETF en portefeuille, mais bien le banquier privé qui gère ses actifs. ” C’est une situation très différente du marché américain, où les particuliers ont pris l’habitude de détenir directement des ETF dans leur portefeuille. Environ 50 % de la richesse en Europe est aujourd’hui située dans le secteur de la banque privée. Mais dans le futur, nous nous attendons à ce que les clients privés européens investissent également dans les ETF eux-mêmes “, indique Mark Wiedman.

A l’échelle mondiale, le spécialiste a également identifié plusieurs autres tendances à suivre dans les prochaines années. Notamment la forte croissance enregistrée dans les solutions Smart Beta, qui visent à construire des indices plus sophistiqués permettant de s’exposer sur des facteurs comme la qualité ou la dynamique du marché. ” Sur le long terme, les entreprises qui affichent ces caractéristiques pourront dégager des performances supérieures aux indices traditionnels “. Dans un autre domaine, Mark Wiedman pointe également les ETF basés sur les critères ESG (environnement, social et gouvernance). ” Les solutions soutenables vont être l’objet d’une demande plus forte de la part des clients. En particulier chez les plus jeunes, davantage sensibles à ces thématiques “.

Tout le monde se lance dans les ETF

Ces derniers mois, de nombreuses initiatives ont été annoncées sur le marché, avec notamment le lancement de nouveaux ETF sur le marché belge. Ce qui confirme que cette branche du marché fait aujourd’hui l’objet de nombreuses convoitises de la part de différents groupes d’acteurs internationaux. Le premier réunit les gestionnaires qui avaient déjà une présence historique dans ce segment du marché, comme Vanguard ou UBS, qui ont annoncé une augmentation de leur offre arrivée sur le marché belge ou un élargissement de leur gamme. L’autre groupe est constitué de gestionnaires traditionnellement spécialisés sur les fonds actifs, comme JP Morgan Asset Management ou Fidelity, et qui ont décidé de passer à la vitesse supérieure afin de rattraper leur retard.

Fidelity International propose ainsi depuis quelques mois une gamme d’ETF Quality Income Beta spécialisée dans les entreprises de qualité qui distribuent des dividendes attractifs sur quatre ensembles géographiques (Europe, Etats-Unis, Marchés émergents et Monde). En avril, le groupe britannique a également lancé six ETF plus classiques (S&P 500, MSCI Europe, etc.) avec des frais extrêmement réduits (entre 0,06 et 0,2%), et qui seront accessibles également aux clients retail.

A noter que le secteur des ETF a aussi vu l’apparition des premiers ETF gratuits, proposés aux Etats-Unis par Fidelity Investments (société indépendante du groupe britannique), ce qui constitue une nouvelle étape dans la lutte que se livrent les promoteurs d’ETF en matière de coûts. Le gestionnaire est en mesure d’afficher un tel tarif en utilisant ses propres indices, et en ayant recours au prêt sur titres pour les actions détenues dans les portefeuilles.

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